Transmettre son entreprise, ce n’est pas qu’une signature chez le notaire. C’est une étape de vie, à la fois humaine et professionnelle. On repousse souvent le moment : le quotidien prend le dessus, les urgences s’enchaînent, et on se dit qu’on verra plus tard.
Rencontre avec :
Sébastien Lecomte, Responsable de territoire chez Cerfrance et coordinateur des 4 jours de la transmission en Sarthe, le constate chaque jour. Qu’il s’agisse d’une ferme, d’une boulangerie ou d’une PME, le déclic arrive souvent au même moment : quand le dirigeant comprend qu’il ne pourra pas tout préparer en quelques mois.
Sébastien a recueilli de nombreux témoignages, réussites comme faux-pas et dans cet entretien, il revient sur les signaux à ne pas ignorer, les erreurs les plus fréquentes et la meilleure façon d’aborder la suite dans les meilleures conditions.
1. On a souvent l’impression que la transmission, c’est une question qu’on aborde à la fin d’une carrière. Pourquoi est-ce encore un sujet que les dirigeants repoussent autant ?
« Souvent, c’est simplement une question de moment. Tant que l’entreprise tourne, le dirigeant se dit qu’il a encore le temps. Le quotidien prend toute la place, et les urgences repoussent les sujets de fond. Et puis, ce n’est pas un cap facile à envisager : transmettre, c’est reconnaître qu’un jour, on ne sera plus aux commandes. Mais le vrai frein, c’est souvent qu’on ne sait pas par où commencer.
On s’imagine des démarches interminables : de la paperasse, du juridique, du patrimoine… alors on ne touche à rien. Chez les artisans ou commerçants, c’est encore plus marqué, car ils travaillent souvent seuls, sans personne pour les alerter et les journées passent vite.
Ce qui bloque, ce n’est pas le refus de transmettre, c’est le manque de clarté sur comment s’y prendre. »
2. Vous accompagnez des profils très différents : agriculteurs, artisans, commerçants, dirigeants de petites entreprises. Est-ce que vous observez les mêmes comportements face à ce moment-là ?
« Pas vraiment. Le rapport à la transmission dépend beaucoup du métier. Chez les agriculteurs, c’est souvent une évidence : à un moment, il faudra passer le relais. Mais c’est aussi très chargé d’émotion, parce qu’on touche à des terres, à une histoire, à une identité. Il y a beaucoup de pudeur tant que rien n’est décidé.
Chez les artisans ou commerçants, c’est plus terre à terre. La transmission fait partie du parcours : on crée, on cède, parfois on recommence ailleurs. Ce qu’ils attendent surtout, c’est qu’on les aide à valoriser ce qu’ils ont construit, à savoir ce que leur entreprise vaut vraiment.
Pour les dirigeants de TPE ou PME, c’est encore autre chose. Ce n’est pas toujours planifié, mais l’idée, c’est de faire perdurer une activité, une équipe, un projet. Ils ont besoin d’y voir clair sur les options possibles, sans qu’on rentre tout de suite dans la technique. »
3. Quand on a la tête dans son activité, comment savoir que le moment est venu d’y penser ?
« Ce n’est pas une grande décision, mais une suite de petits signes. Le dirigeant sent que quelque chose change, sans toujours mettre de mots dessus.
Je pense à un boulanger que j’accompagnais. Il m’avait dit : “Ma boulangerie ne vaut rien, mon four est foutu.” Pour lui, c’était perdu d’avance. En creusant, on a vu tout le reste : une façade refaite, un bon emplacement, une clientèle fidèle… Il ne voyait plus que le problème, pas les atouts. Et souvent, c’est ça le signal : quand on ne voit plus ce qui fonctionne.
Chez d’autres, le déclic vient d’un salarié qui part, d’un projet qu’on repousse, d’une fatigue qui s’installe, ou juste du fait qu’on n’a plus envie de repartir pour dix ans de crédit. C’est le moment de lever la tête, de faire le point : ce qu’on garde, ce qu’on transmet, ce qu’on veut changer.
Pas besoin de tout décider, parfois, une heure de recul suffit à relancer la réflexion. »
4.Beaucoup se disent : « j’aurai le temps plus tard ». En réalité, qu’est-ce qu’on gagne à ouvrir cette réflexion plusieurs années avant le départ ?
« On évite surtout le piège du dernier moment. En y pensant tôt, le dirigeant garde la main sur ce qu’il veut faire : à qui transmettre, comment, quand, et dans quelles conditions. Il n’est pas pris de court, il peut comparer, tester plusieurs options avec son conseiller Cerfrance. Cette marge de manœuvre, on ne l’a plus quand il faut tout décider en urgence.
Et puis, anticiper, c’est bon pour tout le monde.
- Pour l’entreprise, ça préserve la valeur : le dossier est clair, l’activité tourne, un repreneur s’y retrouve plus facilement.
- Pour l’humain aussi : la famille, les salariés, les partenaires savent où on va, les tensions retombent.
Quand on s’y prend tôt, la transmission devient une vraie transition. On prépare la relève, on ajuste l’organisation, on redéfinit son rôle. Certains passent le relais doucement, d’autres restent un temps pour accompagner. Dans tous les cas, ce n’est plus une fin subie, c’est une étape qu’on choisit. »
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5. Vous parlez souvent d’un rendez-vous diagnostic pour entamer cette démarche. Comment se déroule-t-il, et qu’est-ce que les dirigeants en retirent ?
« Chaque situation est différente. Trois dirigeants dans le même secteur peuvent avoir des réalités totalement opposées : l’un prépare son départ, l’autre cherche un repreneur, le troisième veut associer ses enfants.
Le rendez-vous diagnostic préparé avec nos experts Cerfrance sert justement à comprendre le vécu, les projets et les points sensibles avant de parler solutions. C’est un moment d’échange avec plusieurs regards : juridique, fiscal, économique, patrimonial, parfois même social. On met tout sur la table, on repère ce qu’il faut sécuriser et on esquisse les premières pistes.
Le dirigeant repart avec une vision plus claire de ce qu’il faut travailler et surtout avec les bons interlocuteurs pour aller plus loin. C’est souvent la première fois qu’il arrive à se projeter sereinement sur la suite. »
6. Vous coordonnez les 4 jours de la transmission en Sarthe. Qu’est-ce qui fait la force de cet événement selon vous ?
« C’est le rendez-vous à ne pas rater pour ceux qui commencent à y penser sans trop savoir par où prendre le sujet. Pendant la soirée, on donne la parole à ceux qui l’ont vécu des deux côtés : des chefs d’entreprise qui ont transmis, et aussi des repreneurs, comme ce couple qui viendra raconter son parcours. Parfois réussi, parfois semé d’embûches : ce sont ces histoires qui parlent le plus, parce qu’on s’y reconnaît tout de suite.
Agriculteurs, artisans, commerçants… Tous se retrouvent dans la même salle. Et, contre toute attente, le mélange fonctionne. Chacun comprend que, peu importe le métier, les questions sont les mêmes :
- Comment anticiper ?
- Comment faciliter ce passage ?
- Comment transmettre ce qu’on a construit sans le subir ?
C’est cette authenticité qui fait la force de l’événement. Ce ne sont pas nos conseillers qui parlent, ce sont les dirigeants eux-mêmes. Ce temps d’échange remet le sujet en mouvement, ils repartent avec l’envie d’agir, pas seulement d’y réfléchir. »
7. Si vous aviez un message à faire passer à un dirigeant qui hésite à franchir le pas, quel serait-il ?
« Le bon moment, c’est quand la question commence à trotter dans la tête. Il ne faut pas attendre d’être fatigué, ni d’avoir un repreneur à la porte pour y penser. Plus on anticipe, plus on garde la main sur ses choix.
Et puis, parler de transmission, ce n’est pas parler de départ. C’est réfléchir à la suite : comment faire vivre ce qu’on a construit et comment passer le relais dans de bonnes conditions ? Chaque parcours est différent, mais tous gagnent à être préparés à temps.
Pour aller plus loin
Sébastien Lecomte vous donne rendez-vous aux 4 jours de la transmission, du 17 au 20 novembre 2025 au Mans
Un rendez-vous ouvert à tous les dirigeants, porteurs de projets ou futurs repreneurs, autour de témoignages, d’échanges et de rencontres avec les conseillers Cerfrance.
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